Rivista di Scienza - Vol. II/L'école économique autrichienne: Ses théories. Conclusion
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L’ÉCOLE ÉCONOMIQUE AUTRICHIENNE
II. Ses théories. - Conclusion.
I.
J’ai exposé les idées de l’école autrichienne sur l’objet et sur le méthode de l’économique. Il faut, maintenant, parler des théories que les économistes de cette école ont produites, de la contribution qu’ils ont apportée à la science économique. Mais il ne saurait être question ici de donner un exposé complet des théories autrichiennes, mon dessein étant avant tout, comme je l’ai dit déjà, de caractériser l’école autrichienne, de montrer comment elle a compris la recherche économique. Je ne m’occuperai donc que de deux théories, parmi celles que les économistes autrichiens ont élaborées: celle de la valeur et celle de l’intérêt. Ce sont ces théories qu’il convient de choisir ici, le problème de la valeur et celui de l’intérêt étant ceux auxquels nos économistes ont donné le plus d’attention, et pour la solution desquels ils ont le plus fait.
1. Théorie de la valeur. — Sur la question de la valeur il y a, peut-on dire, une théorie qui est la théorie commune de l’école autrichienne tout entière. Les divergences qui existent entre les membres de cette école ne portent que sur des points secondaires. Je me servirai donc, pour mon exposé, des travaux des uns et des autres — notamment de ceux de Menger, de Wieser et de Bohm-Bawerk, qui sont les plus complets et les plus précis — ; et je ne donnerai pas de référence particulière à tel ou tel auteur.
Qu’est-ce que la valeur? C’est quelque chose qui a du rapport avec l’utilité: là-dessus, aucun doute n’est possible. Un bien n’a de valeur pour nous que s’il nous est utile. Mais cependant la valeur n’est point identique à l’utilité: et la preuve, c’est qu’il est des biens extrêmement utiles — l’air, l’eau pour beaucoup d’hommes — qui n’ont aucune valeur.
Pour comprendre la nature du lien qui unit les deux notions de la valeur et de l’utilité, il faut considérer que l’utilité des biens décroît pour nous à mesure que s’accroît la quantité que nous en possédons: cela tient à la nature même de nos besoins, qui diminuent d’intensité à mesure qu’on les satisfait. Prenons l’eau, par exemple: si nous en avons une certaine quantité à notre disposition, nous nous en servirons d’abord pour étancher notre soif; mais la quantité d’eau qu’il nous est nécessaire, ou même qu’il nous est agréable de boire est limitée. Le surplus donc, s’il y en a un, sera employé pour la cuisine, pour la toilette, etc. Et plus nous aurons d’eau, moins les emplois qu’il nous faudra donner à cette eau, pour l’utiliser, représenteront d’utilité. Un moment pourra venir même où il y aura excès, où l’accroissement de la quantité d’eau, au lieu d’augmenter notre bienêtre, nous causera de l’ennui.
Si nous appelons utilité-limite ou utilité marginale d’un bien l’utilité de la dernière portion de ce bien — entendons de la moins utile — , nous pourrons dire que la valeur des biens, pour ceux qui les possèdent, est réglée par leur utilite-limite, ou par leur utilité marginale. Il faut supposer ici, naturellement, que ces biens sont employés au mieux; s’ils peuvent servir à satisfaire plusieurs besoins, il faut supposer qu’on les emploie tout d’abord à satisfaire les plus importants de ces besoins, ou pour parler plus exactement, qu’on les repartit entre les divers besoins qu’ils sont propres à satisfaire de la manière qui portera notre bien-être à son maximum.
Soit un colon qui dans une région écartée, dépourvue de tout moyen de communication, a récolté une certaine quantité de blé. De cette récolte, un cinquième lui est nécessaire pour pourvoir à sa subsistance jusqu’à la récolte suivante; un autre cinquième lui permettra de s’alimenter plus copieusement, pour le profit de sa santé; la troisième part servira a engraisser de la volaille; la quatrième, à fabriquer de l’eau-de-vie; quant à la dernière part, il n’aura pas mieux à en faire que d’en nourrir des perroquets qui le divertiront. Eh bien, c’est l’utilité de cette dernière portion de la récolte qui déterminera la valeur de la récolte tout entière; cette valeur sera égale à cinq fois l’utilité en question.
On notera que parmi les emplois que l’on peut faire des biens il faut considérer, non seulement ceux qui consistent à utiliser ces biens directement, mais encore ceux qui consistent à les utiliser indirectement, et en particulier cet emploi qui consiste à les échanger. Si un fabricant devait employer à son usage personnel les objets qu’il fabrique, ceux-ci, à l’ordinaire, n’auraient pour lui aucune valeur. Ils en ont une cependant, et c’est parce que notre fabricant est assuré de vendre ses produits un certain prix tout au moins.
On s’explique maintenant le paradoxe que j’indiquais tantôt. Certains biens n’ont aucune valeur, quoiqu’ils servent a satisfaire des besoins vitaux: c’est que nous en sommes très abondamment pourvus, si abondamment, que nous ne souffririons aucunement d’en céder une petite quantité. Et l’on peut comprendre aussi ce fait d’observation, connexe au précédent, que la valeur totale d’un bien diminue — cela arrive à partir d’un certain point — quand la quantité en augmente.
Comment un individu qui, par son travail ou avec son argent, peut se procurer des biens divers réglera-t-il ses acquisitions? Qu’est-ce du moins que son intérêt lui prescrit? Cet intérêt lui prescrit — c’est là une chose bien évidente, et même une tautologie — de se procurer ces biens qui lui seront le plus utiles, et de se les procurer en telle quantité que son bien-être soit porté au plus haut point. Il suit de là que les utilités marginales des biens qu’il se procurera, pour des dépenses, des sacrifices égaux, devront être égales autant que possible. Il faudra, si possible, que l’utilité marginale des aliments que je me procure avec une heure de travail ou avec un franc soit égale à l’utilité marginale de ce que je me procure, avec une heure de travail ou avec un franc, en fait de vêtements, de moyens de chauffage, etc.
De ce qui précède, il résulte que l’utilité marginale des biens est plus basse pour ceux qui ont beaucoup de biens, pour ceux qui sont riches que pour ceux qui sont pauvres. Une livre de pain, un litre de vin ajoutent moins au bien-être du riche qu’à celui du pauvre. En ce sens, la valeur du pain ou du vin est moindre pour le riche. Mais en même temps, s’il s’agit d’obtenir des biens par l’échange — moyennant d’autres biens, ou de l’argent — , le riche sera en mesure de donner beaucoup plus que le pauvre pour se procurer la même utilité, voire pour se procurer une utilité moindre: le riche pourra payer plus cher que le pauvre — et il sera disposé à le faire, il le fera effectivement — un objet qui serait nécessaire à l’autre, et dont la possession pour lui ne représentera que la satisfaction d’un caprice. Il faut distinguer entre la valeur et l’estimation de la valeur1: l’estimation de la valeur se fait en rapportant la valeur des biens à tel ou tel bien — l’argent par exemple — considéré dans sa quantité.
J’ai parlé, jusqu’à présent, des biens en général. Il y a deux catégories de biens dont il importe de s’occuper d’une manière spéciale: les biens complémentaires et les bien productifs.
Les Autrichiens disent que des biens sont complémentaires quand il faut les réunir ensemble pour qu’ils nous soient utiles, ou pour qu’ils aient toute leur utilité: qu’on pense au papier, à la plume et à l’encre, au cheval et à la voiture, au gant droit et au gant gauche, etc. Comment se mesure la valeur de ces biens? Pour ce qui est des groupes qu’ils forment, la question ne présente aucune difficulté: chaque groupe de biens complémentaires a sa valeur mesurée par son utilité. Mais que dire des membres qui composent les groupes en question? Ici, il est nécessaire d’introduire des distinctions.
Supposons premièrement que les éléments qui composent nos groupes ne puissent pas, en cas de perte, être remplacés. Si ces éléments n’ont point d’autre utilité que celle qu’ils présentent en tant que biens complémentaires, la valeur de chacun d’eux sera égale à la valeur du groupe: ou encore si on le prend d’une autre façon — cette valeur sera nulle. Un soulier vaut autant que la paire dont il fait partie; et à un autre point de vue — où il est préférable peut-être de se placer — , il ne vaut rien absolument, s’il est seul.
Si les biens complémentaires, maintenant, ont une utilité même isolés, leur valeur ne pourra pas être regardée comme nulle; elle ne descendra pas au-dessous de cette utilité qu’ils offrent quand on les prend séparément.
Reste le cas des biens complémentaires qui peuvent être remplacés. De ceux-là, ce qu’il est nécessaire de dire, c’est que leur valeur ne sera jamais supérieure à celle des biens qui peuvent leur être substitués. On remarquera, au reste, que la substitution à un bien complémentaire d’un autre bien tantôt sera parfaite — le substitut tenant exactement la plaee du premier bien — , et tantôt au contraire ne mettra point tout-à-fait les choses dans l’état primitif.
Est-il besoin de montrer l’intérêt de toutes ces considérations sur les biens complémentaires? Il suffira de faire observer que le nombre des biens complémentaires est très grand. En particulier, les biens productifs sont presque toujours des biens complémentaires: presque toujours, la production exige le concours, l’emploi simultané d’une multiplicité de biens; l’industriel, par exemple, qui a une usine emploie de la main-d’oeuvre, des matières premières, des machines, il occupe un emplacement, etc. Et l’on ne pourra point comprendre la manière dont la valeur, dont les prix de ces divers moyens de production se déterminent si l’on n’a pas étudié au préalable la question dont nous venons de nous occuper.
Quant aux biens productifs en tant que tels — abstraction faite du caractère qu’ils présentent généralement de biens complémentaires — , leur valeur dépend de l’utilité dos biens «directs» ou biens «du premier ordre» qu’ils servent à produire. La valeur d’un bien productif est mesurée par l’utilité du moins utile des produits qu’il donne ou qu il sort à créer. Si, possédant trois unités d’un bien A, on s’en sert pour obtenir trois biens B, C et D dont les utilités respectives sont 100, 120 et 200, la valeur de l’unité de A sera égale à 100. Et il faut ajouter que la valeur de C et de D sera aussi égale à 100. ()!»tenus, en effet, de la même façon que B, C et D ne sauraient avoir une valeur différente de la sienne. Ainsi l’utilité du moins utile des biens directs qui dérivent d’un bien productif détermine la valeur de ce bien productif; ce bien productif, à son tour, communique cette même valeur aux autres biens directs, Et c’est cette dernière remarque qui donne son sens à la formule si souvent employée par les économistes, que la valeur des biens est déterminée par leur coût de production — ou de reproduction — : c’est elle qui donne la justification de cette formule, pour les cas où elle se vérifie, et qui permet aussi de déterminer dans quels cas elle se vérifie.
Voilà l’essentiel de la théorie autrichienne de la valeur d’usage. Il reste à parler de la valeur d’échange, du prix. Cette deuxième sorte de valeur procède de la première. Comment? Pour l’expliquer, je m’attacherai exclusivement à l’une des hypothèses que l’on doit envisager ici: celle d’une multiplicité de vendeurs se trouvant, sur un marché, en présence d une multiplicité d’acheteurs.
Soit par exemple un certain nombre de vendeurs qui amènent au marché chacun un cheval. Rangeons ces vendeurs d’après l’estimation croissante qu’ils font de la valeur de leurs chevaux. Le premier estime son cheval 100 florins les autres 110, 150, 170, 200, 215 florins, etc. Rangeons les acheteurs, d’autre part, d’après l’estimation décroissante qu’ils font de la valeur des chevaux. Le premier est disposé à payer pour un cheval, s’il le faut, 300 florins; les autres sont disposes à payer, respectivement, 280, 260, 240, 220, 210, 200 florins, etc. Dans ces conditions, il sera vendu 5 chevaux; et le prix du marché s’établira entre 210 et 215 florins, c’est-à-dire entre le prix au-dessous duquel ne pouvait pas monter le premier des acheteurs exclus, et celui au-dessous duquel ne pouvait pas descendre le premier des vendeurs exclus. Le prix ne pourra pas être inférieur à 210 florins: car alors il y aurait plus de 5 acheteurs qui pourraient acheter, tandis qu il n y aurait que 5 vendeurs — au maximum — pour vendre. Il ne peut pas être supérieur à 215 florins, car il y aurait plus de 5 vendeurs qui seraient en mesure de vendre, tandis qu’il n’y aurait que 5 acheteurs — au maximum — pour acheter. Ce n’est pas la peine de représenter la suite des tâtonnements, des marchandages par lesquels on arrivera au prix que j’ai dit: cette suite, au reste, peut se développer en toutes sortes de façons. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’il n y aura qu un prix sur le marché: notre premier acheteur en effet - le premier d’après la série de tantôt — ne voudra pas payer plus cher que le dernier acheteur admis, et rien ne l’obligera à payer plus cher; le premier vendeur d’autre part ne voudra pas vendre moins cher que le dernier vendeur admis. Or, n’y ayant nécessairement qu’un prix, ce prix devra être tel que le nombre des ventes qu’il rend possibles soit égal au nombre des achats: il sera donc celui que j’indiquais.
D’une manière générale — on me dispensera de fournir les autres exemples qu’il faudrait introduire pour justifier cette formule — , le prix sera déterminé par l’estimation que font de la valeur des biens les deux couples-limites, celui d’une part du dernier acheteur admis et du premier vendeur exclu, celui d’autre part du premier acheteur exclu et du dernier vendeur admis.
Que devient, dès lors, cette loi si souvent énoncée par les économistes, d’après laquelle le prix des biens multipliables serait réglé par leur coût? Elle apparaît comme une loi dérivée, qui a son fondement dans la théorie exposée ci-dessus. Chacun cherchant à tirer le meilleur parti dos moyens de production qu’il possède, la production s’organisera en telle façon que chaque sorte de moyens productifs donne autant que possible, dans tous les emplois divers qu’elle recevra, le même produit. Supposons (pie chaque quintal do fer demande, pour être obtenu, journées dé travail, et que la journée de travail soit payée 1 florin. Par suite des progrès de la technique métallurgique, on arrive à obtenir le quintal de fer avec seulement 2 journées de travail. Le fer, tout d’abord, continue à se vendre 3 florins le quintal. Mais alors, dans cette branche de la consommation qui absorbe le fer, les besoins se trouvent n’être satisfaits qu’autant qu’ils sont en mesure de payer 1,50 florin pour chaque journée de travail, tandis que dans toutes les autres branches ces besoins sont satisfaits qui paient la journée de travail 1 florin. Cela ne saurait durer: on développera la production du fer, on offrira du fer en plus grande quantité, et cela, jusqu’à ce qu’on atteigne ces besoins qui pour se satisfaire peuvent donner 1 florin seulement par journée de travail, en d’autres termes, jusqu à ce que le prix du fer soit descendu à 2 florins le quintal.
On le voit, le prix des biens multipliables tend — perpétuellement — vers leur coût. Mais il ne fait que tendre vers lui. Et il est indispensable d’entrer dans l’analyse de tantôt si l’on veut comprendre pourquoi il en est ainsi, mieux que cela, si l’on veut pouvoir donner un sens à la notion même du coût de production.
2. Théorie de l’intérêt. — La théorie générale de la valeur fournit la clef de tout le problème de la distribution des richesses: car ce sont des échanges toujours — prenons ici le mot dans son sens le plus large — qui donnent naissance aux différents revenus. L’application, toutefois, de la théorie de la valeur aux questions diverses de la distribution n’est pas sans présenter beaucoup de difficultés. La question de l’intérêt du capital est particulièrement épineuse; et c’est pourquoi ceux des économistes autrichiens qui s’en sont occupés sont arrivés à des conception sensiblement divergentes. Je ne m’attacherai qu’à celles de Böhm-Bawerk, qui méritent le plus d’être connues.
D’après Böhm-Bawerk, l’intérêt du capital a son explication dans la préférence que les hommes accordent aux biens présents sur les biens futurs. Cette préférence, à son tour, vient de trois causes.
Les trois causes ci-dessus font que l’on préfère les biens présents aux biens futurs; elles donnent naissance à un agio eu faveur des biens présents. Et cet agio sera uniforme sur tout le marché; il sera, en outre, proportionnel à l’éloignement des biens futurs; sans quoi on aurait avantage à, pratiquer des «arbitrages», et la proportionnalité serait établie par là.
L’intérêt n’est, pas autre chose que cet agio dont je viens de parler. Il est le prix pour lequel des biens présents sont cédés contre des biens futurs. Celui qui prête 1.000 francs pour un an exige qu’on lui rembourse à l’échéance, non pas 1.000 francs, mais 1.050. Il échange, en somme, 1.000 francs présents contre 1.050 francs qui lui seront verses après un an. L’entrepreneur qui emploie des ouvriers ne donne pas à ceux-ci le « produit intégral de leur travail »; et ainsi il obtient un intérêt, lui aussi, pour ses capitaux: c’est qu’il paie ses ouvriers au jour le jour, alors que les biens à la production desquels ils travaillent ne pourront être vendus que longtemps après. Notre entrepreneur, peut-on dire, fait des avances à ses ouvriers: il leur fournit des biens présents — leur salaire, leur subsistance — en échange de ces biens que le travail des ouvriers produira plus tard, on qu’il produit, tout de suite, si l’on veut ainsi parler, mais qui ne prendront que plus tard toute leur valeur. L’intérêt, enfin, que l’on s’assure en achetant des biens durables est analogue à l’intérêt des capitaux d’entreprise. Celui qui achète une maison de rapport, dont il ne touchera les loyers que par la suite, paie, en raison de ce fait, une somme inférieure au total de ces loyers qu’il touchera.
II.
J’ai résumé — d’une manière extrêmement sommaire — la théorie de l’école autrichienne sur la valeur et la théorie particulière de Böhm-Bawerk sur l’intérêt. Ces théories ne sont pas, à mon avis, sans appeler des réserves. Pour ce qui est de la théorie de la valeur, il est permis de se demander si l’idée de la valeur d’usage ou valeur subjective — de cette valeur qui serait égale à l’utilité marginale des biens multipliée par la quantité possédée — , si cette idée, qui tient dans cette théorie une si grande place, correspond à autre chose qu’à une certaine illusion où nous pouvons incliner plus ou moins; il est permis de trouver, tout au moins, que l’on peut très bien se passer de cette notion pour expliquer — je veux dire pour expliquer à la manière des Autrichiens — la valeur d’échange, la détermination des prix. La théorie de Böhm-Bawerk sur l’intérêt me paraît plus critiquable encore. Elle contient à peu près tous les éléments de la solution du problème, et par la elle représente un progrès très important par rapport aux théories antérieurement émises sur la même question. Elle ne contient pas, cependant, tous les éléments de la solution, et elle n’enchaîne pas d’une façon satisfaisante ceux qu’elle contient.
Ce n’est le lieu, toutefois, de discuter à fond les théories exposées ci-dessus2. Si j’ai résumé ces théories, ç’a été surtout pour illustrer les conceptions que les économistes autrichiens se sont faites sur l’objet et la méthode de l’économique. Ce sont ces conceptions qu’il s’agit ici d’apprécier. Pour cela, j’examinerai successivement les conceptions des trois écoles auxquelles l’école autrichienne s’oppose, à savoir de l’historisme pur, de l’école inductive et de l’école classique.
1. L’historisme. — L’historisme pur n’a peut-être été professé par aucun économiste; mais beaucoup d’économistes l’ont pratiqué, en ce sens qu’ils se sont consacrés exclusivement à l’étude des faits économiques passés et présents, je veux dire des faits économiques complexes. Quelle importance y a-t-il lieu de reconnaître à une telle étude?
Si nous élargissons la question que je viens de poser, si nous considérons, non point l’économique en particulier, mais l’ensemble des branches de la recherche, nous trouverons que l’étude historique — c’est-à-dire la constatation des faits, et spécialement des faits complexes — est utile ou intéressante à plusieurs titres.
L’étude historique, tout d’abord, satisfait par elle-même notre curiosité. Elle nous procurera par là un plaisir qui sera plus ou moins vif. Cela dépendra, notamment, de la diversité et de l’étrangeté des tableaux, des choses que l’histoire nous fera connaître: ainsi l’histoire naturelle, qu’elle s’occupe des espèces disparues ou des espèces existantes, présente un grand attrait à cause des formes variées, des mœurs curieuses, comme l’on dit, des êtres qu’elle nous présente; il n’est pas besoin, d’autre part, de parler de cet intérêt dramatique que l’on trouve dans l’«histoire», au sens familier du mot. Et il faut tenir compte également, ici, de la proximité plus ou moins grande, par rapport à nous, des faits auxquels l’histoire s’attache: nous désirons savoir, par exemple, comment ont vécu les générations qui nous ont précédés sur la terre, de la même manière, pour les mêmes raisons qui font que nous désirons connaître la vie des individus dont nous descendons.
En deuxième lieu, l’histoire constitue une réserve de matériaux qui serviront à découvrir ou à vérifier des lois. D’un réserve pareille, il est des sciences qui peuvent se passer presque complètement: telles la physique ou la chimie. C’est que les phénomènes dont ces science s'occupent sont des phénomènes relativement très simples, et qui en raison de cette simplicité même se répètent identiques un nombre considérable de fois, que l’on peut reproduire à volonté. Mais prenons ces faits qui sont la base de certaines parties de la sociologie: les institutions politiques ou juridiques, si l’on veut. Ce sont des faits éminemment complets, et qui pour cette cause évoluent perpétuellement sans que jamais d’une époque à l’autre, d’un pays à l’autre on les retrouve exactement identiques. Il est donc nécessaire, pour permettre la constitution de la science sociologique, que l’on étudie les institutions politiques et juridiques qui ont existé ou qui existent, et que l’on conserve, après l’avoir faite, l’histoire de ces institutions3.
En troisième lieu, l’histoire — en tant qu’elle s’occupe du présent — nous renseigne sur les problèmes pratiques que nous avons à résoudre: elle en détermine les données d’une manière plus complète et plus précise.
Tels sont les trois grands services que nous rend l’étude historique. Considérant ces services, on se persuadera aisément que pour l’économique en particulier l’étude historique a une importance extrême. L’histoire économique nous présente des laits très divers, et dont beaucoup nous touchent de très près: elle offre donc un intérêt de curiosité. Cette histoire aidera beaucoup a la constitution de la science économique: les faits économiques complexes qu’elle rassemble — faits qui à cause de leur complexité même sont destinés à demeurer singuliers — serviront de base pour des inductions, et permettront de contrôler des déductions auxquelles on aura procédé. Enfin — et peut-être est-ce ici la première des utilités qu’elle a — l’histoire économique nous documentera sur ces problèmes pratiques dont la préoccupation est la justification principale de toute recherche, même théorique.
L’histoire économique a donc une importance très grande. Mais si l’on néglige cet intérêt de curiosité qu’on y peut trouver, et qui est certainement quelque chose de secondaire, si l’on se place exclusivement au point de vue scientifique, elle a de l’importance parce qu’elle aide à la constitution d’une part, a l’application de l’autre de la science économique; elle n’a pas d’importance par elle-même. Et c’est ce que les économistes autrichiens ont bien vu.
2. L’école inductive. — Il n’y a pas eu jusqu’ici d’école, dans l’économique, que l’on ait appelé ainsi; il n’y a même pas eu à vrai dire d’école qui mérite cette appellation. Mais parmi les membres de l’école dite historique il en est que l’on peut regarder comme des inductivistes — s’il est permis de risquer ce mot — . Ceux des membres de l’école historique qui n’ont point prétendu enfermer les économistes dans une tâche d’historiens, qui ne se sont point confinés dans une telle tâche, n’ont guere admis, et surtout n’ont guère pratiqué, comme moyen de déterminer des lois, que l’induction; pour être plus précis, ils n’ont guère pratiqué que cette induction qui se base sur l’observation des faits complexes — des statistiques notamment — . Que faut-il penser de cette méthode?
L’induction, dans certaines sciences, est un moyen d’investigation scientifique extrêmement précieux: qu’il suffise de citer des sciences comme la physique, la chimie, la biologie. Mais il faut se rendre compte que dans l’économique, les conditions de l’investigation scientifique sont tout autres que ce qu’elles sont dans les sciences ci-dessus.
Tout d’abord l’économiste ne peut point pratiquer sauf peut-être dans des cas exceptionnels — l’expérimentation. Cela tient, entre autres choses, A la solidarité qui unit, aujourd’hui surtout, les phénomènes économiques par groupes très étendus, et qui fait que l’action d’un individu, d’un expérimentateur, est impuissante à produire, par rappori aux faits qu’il peut se proposer d’étudier, des effets appréciables. Il ne me sera pas possible, pour vérifier telle hypothèse que j’aurai formée sur la question des prix, ou de l’intérêt, de modifier — comme il serait nécessaire, de faire le cours des marchandises ou le taux de l’intérêt sur le marché.
Reste donc, comme fondement pour l’induction, l’observation. Il faudra que celle-ci nous présente dans la réalité des applications spontanées, si l’on peut ainsi dire, de ces méthodes logiques par lesquelles des relations causales peuvent être découvertes. Mais cela n’arrivera que bien rarement: et la raison en est dans la très grande complexité de ces phénomènes auxquels s’attachent les partisans exclusifs de l’induction. Reprenons l’exemple de l’intérêt du capital. Notant les variations que le taux de cet intérêt a subies, dans les divers pays, d’une époque à l’autre, notant en même temps les variations concomitantes de tels et tels autres phénomènes économiques, est-il concevable que l’on arrive jamais a expliquer le fait de l’intérêt? On peut hardi,ment répondre que non. Et, il n’est pas besoin pour cela de se londer sur une théorie de l’intérêt à laquelle on sera arrivé par quelque autre voie: il suffit de considérer la multiplicité des phenomenes avec lesquels le phénomène de l’intérêt, manifestement, se trouve en relation.
Ce n’est pas tout. Faisons l’induction plus efficace qu’elle n’est à coup sûr. Pour pouvoir l’employer, il sera indispensable — c’est là un point que trop souvent l’on oublie, ou que l’on ne veut pas voir — de recourir à des hypothèses. L’induction ne saurait aller sans une hypothèse qui la guide, qui l’inspire. Or ces hypothèses sans lesquelles on ne saurait procéder à des inductions impliquent une élaboration préalable des concepts, tout un travail préliminaire destiné à débrouiller les choses — qu’on me passe cette expression vulgaire — : et un tel travail ne peut consister qu’en des observations portant sur les phénomènes économiques élémentaires, et en des déductions où ils figureront comme prémisses. Pour construire une théorie de l’intérêt inductivement, en se basant par exemple sur les données des statistiques, il faudrait s’être fait au préalable une idée de ce que c’est que le capital, de ce qui donne naissance à l’intérêt: et on n’y peut guère arriver que comme je viens de dire.
Négligeons la remarque précédente. Ce qui reste, c’est que la méthode inductive, telle qu’on l’entend, est assez inféconde en économique. Cette autre méthode donnera beaucoup plus de résultats qui part des faits élémentaires et familiers et s’en sert pour étendre déductivement la connaissance. Les phénomènes économiques se présentent à nous comme formant de vastes systèmes solidaires où tout s’enchaîne, où toutes les parties composantes agissent les unes sur les autres; ou bien ils sont les résultantes de cette énorme masse d’actions et de réactions: c’est ce qui empêche qu’observant les ensembles, ou les résultantes, on puisse se servir très utilement de l’induction. Mais en même temps les éléments des systèmes que je disais sont très simples; il se ramènent à un petit nombre de types; ils nous sont accessibles: nous pouvons donc, une fois que nous les avons saisis et notés, comprendre par le raisonnement déductif comment ces ensembles se construisent, et comment ces résultantes se déterminent dont je parlais tantôt.
3. L’école classique. — Il me faut maintenant mettre les conceptions de l’école autrichienne en comparaison avec celles de l’école classique, et d’une manière générale de ces économistes qui, usant de la déduction, n’ont pas donné autant d’attention que les Autrichiens à l’origine psychologique des phénomènes économiques. Mais je pourrai être bref sur ce point: car je pense avoir suffisamment montré, quand j’ai exposé les vues de l’école autrichienne, la supériorité de ces vues.
Les économistes que l’on appelle déductifs ont su tous que les phénomènes économiques procédaient d’une activité consciente de l’homme; ils ont tous mis à la base de leur doctrine des notions, des faits d’ordre psychologique. Ils ont eu cependant une tendance tâclieuse — si l’on excepte les Autrichiens et ceux qui après eux se sont inspirés de leur enseignement — à oublier trop vite que l’explication des phénomènes économiques doit être toujours, en dernière analyse, psychologique; ils sont tous plus ou moins tombés dans la faute de traiter ces phénomènes comme des phénomènes physiques. J’ai dit qu’en conséquence de cela leurs théories n’expliquaient qu’incomplètement les faits auxquels elles se rapportent, et que souvent inertie elles étaient entachées d’erreur. J’ai cité des exemples; il est facile d’en trouver d’autres. Parmi les erreurs les plus fâcheuses où les économistes classiques sont tombés, il convient de compter d’une part celles que l’on trouve dans leurs théories de la monnaie, et d’autre part celles que l’on trouve dans leurs théories du commerce international. Les premières procèdent de Passiinilation inexacte de la monnaie aux marchandises ordinaires; les autres de l’assimilation des nations qui échangent aux individus. Ces erreurs sont nées de ce que les classiques n’ont par cherché à se représenter d’une manière exacte le mécanisme des opérations où la monnaie ligure, ni le mécanisme du commerce extérieur: ils n’ont pas analysé assez ces opérations, ils n’ont pas pris la peine de remonter jusqu’aux mobiles des gens qui y participent et d’embrasser du regard tout cet enchaînement par lequel elles se rattachent a ces mobiles et en dérivent.
J’ai parlé déjà de certaines théories incomplètes et inexactes des grands classiques sur la valeur. Une comparaison plus instructive encore est celle qu’il convient de faire de la théorie de l’utilité-limite, telle qu’elle se trouve chez les Autrichiens, et de cette même théorie, telle qu’elle se trouve chez d’autres économistes. On sait que la theorie de l’utilite-limite avait été exposée une première fois par Gossen, en 1854, sans être remarquée par personne. Elle devait être présentée au public, plus tard, presque simultanément par Menger, Jevons et Walras. Mais de ces trois auteurs, c’est Menger qui lui a donné la forme la plus satisfaisante. Jevons, après avoir dit que l’utilité des biens décroissait quand la quantité en augmentait, tire immédiatement de là la loi selon laquelle les marchandises s’échangeront les unes contre les autres; il ne prend pas assez la peine de nous faire comprendre pourquoi les marchandises s’échangeront selon cette loi, il ne nous explique pas suffisamment le mécanisme de la détermination des prix. Et il en est de même pour Walras: celui-ci est détourné de nous donner ces explications, nécessaires pourtant, par le souci qu’il a de traiter mathématiquement le problème des prix.
III.
Les conclusions auxquelles j’arrive sont favorables aux conceptions de l’école autrichienne. Il y a lieu d’approuver, ce me semble, les idées des économistes autrichiens sur l’objet et sur la méthode de l’économique. Mais alors la question se pose de savoir pourquoi ces idées, si elles ont des partisans, ont aussi des adversaires, pourquoi elles ne se font pas accepter de tous les économistes.
Dirons-nous qu’il est des gens qui préfèrent à la recherche «théorique», à l’analyse, le travail purement historique parce que ce travail est à bien des égards plus facile, parce qu’il permet l’utilisation d’aptitudes intellectuelles plus communes, et qu’il expose moins à la critique ceux qui s’y adonnent? Dirons-nous qu’il est d’autres gens qui ne réussissent pas à s’intéresser aux questions spéculatives, ou qu’une hâte excessive d’aborder les problèmes pratiques empêche d’approfondir ces questions? Cela n’expliquera pas comment on peut, si souvent, mépriser ou dédaigner, dans l’économique, l’investigation proprement scientifique. Et cela n’expliquera surtout pas comment, chez ceux qui admettent l’importance de cette investigation et qui s’y adonnent, des divergences d’opinion peuvent exister, touchant la manière dont elle devra être conduite.
Ce qu’il faut prendre en considération, ici, c’est Aie l’emploi de la méthode préconisée par les Autrichiens ne permet guère, quelque habilement qu’on la manie, quelque simples que soient — relativement — les questions auxquelles on l’applique, d’arriver du premier coup à édifier des théories parfaites et définitives; il s’en faut même de beaucoup: et l’on prendra texte de cela pour douter ou pour nier que la méthode convienne pour l’étude des questions économiques.
C’est que les écueils sont nombreux que l’on rencontre lorsqu’on veut se servir de la méthode des Autrichiens. Commençant par observer les faits élémentaires qui aideront à résoudre les problèmes étudiés, on courra le risque de négliger certains de ces faits; c’est ainsi par exemple que Böhm-Bawerk a négligé le fait que la capitalisation, normalement, dérange l’équilibre de la consommation dans les mofnents successifs du temps: fait très important pour l’explication de l’intérêt, parce qu’il est la cause principale qui limite la capitalisation. Il pourra arriver, en deuxième lieu, que l’économiste ne note par avec une exactitude ou avec une précision suffisante ces faits élémentaires qui seront comme la base de ses constructions. Il sera exposé, encore, à ne pas bien voir les rapports qui existent entre eux, à les combiner, à les enchaîner dans ses déductions d’une manière qui ne sera point conforme à la réalité. Il pourra, enfin, commettre des fautes de logique dans la construction de ses théories.
Mais imaginons qu’un auteur soit parvenu à édifier, sur une question donnée, une théorie parfaitement correcte. Cette théorie ne s’imposera pas aux économistes comme certaines découvertes de la physique, de la chimie, de la biologie s’imposent à ceux qui s’occupent de ces sciences. Les théories, les lois économiques sont abstraites, en un sens, plus que les théories, les lois physiques, chimiques ou biologiques: je veux dire que celles-là considèrent à part, dans le complexus de la réalité, des phénomènes qui ne sont pas isolables au même point que les phénomènes physiques, chimiques ou biologiques; l’abstraction qu’elles opèrent paraîtra donc plus arbitraire que l’abstraction physique, chimique ou biologique.
Et voici d’autres remarques — qui d’ailleurs ne sont pas sans se rattacher à la précédente — . Les théories économique-s ne sont guère susceptibles de recevoir une vérification expérimentale, pour cette raison que l’expérimentation, dans l’économique, est à peu près impossible. Elles ne pourront pas recevoir, notamment, cette vérification — d une certaine façon la plus convaincante — qui résulte de l’application, de l’utilisation pratique immédiate de la vérité spéculative. Elles pourront être vérifiées par l’observation? Difficilement, vu la complexité extrême de ces systèmes que forment les phénomènes économiques. Mais à quoi bon insister sur ce point? La vérification des théories économiques est difficile et on le comprendra sans peine — pour ces mêmes causes qui rendent la méthode purement inductive relativement inféconde dans l’économique. Or ces causes, je les ai dites déjà. J’ajouterai seulement l’indication d’une difficulté que je n’ai pas mentionnée encore: celle qui résulte, dans bien des questions économiques, de la nécessité de mesurer des phénomènes qui en fait tout au moins ne sont pas mesurables. Pour vérifier une théorie comme la théorie autrichienne de la détermination des prix, il faudrait connaître, pour un marché, l’estimation que les vendeurs et les acheteurs font des marchandises qui seront échangées; et cela est manifestement impossible.
Que reste-t-il donc, comme moyen de savoir si une théorie économique du genre des théories autrichiennes est vraie ou non? Point d’autre moyen que de considérer cette théorie en elle-même, de voir si les faits élémentaires sur lesquels elle se base ont été bien observés, si la théorie ne présente pas de vice logique, etc. Mais pour employer ce moyen, il faut tout d’abord faire confiance à la méthode par laquelle la théorie en question a été construite: et beaucoup s’y refuseront. Il faut ensuite prendre la peine d’étudier la théorie avec soin, l’embrasser à la fois dans son ensemble et dans ses détails: et c’est là un effort que bien peu de gens voudront s’imposer.
Ainsi, les résultats auxquels on peut arriver quand on s’inspire des conceptions de l’école autrichienne sur l’économique seront presque toujours imparfaits; et même s’ils ne le sont pas, ils pourront toujours être contestés ou méconnus. Ne nous étonnons donc pas, dès lors, si ces conceptions se heurtent encore à la contradiction et au doute. Félicitonsnous, plutôt, des progrès qu’elles ont faits. Compie je l’ai indiqué déjà,» l’activité de l’école autrichienne proprement dite est bien ralentie, et paraît presque épuisée. Est-ce dû à la cohésion trop étroite de cette école, à la trop grande docilité de ceux des disciples qui ont voulu continuer l’oeuvre des maîtres — cohésion, docilité qui ne peuvent être que des causes de stagnation intellectuelle — ? Cela tient-il à ce qu’un courant très puissant, dans tous les pays allemands, entraîne vers l’étude des questions pratiques les meilleurs esprits et la tentation est toujours forte, pour l’économiste, de verser complètement dans cette étude — ? Il suffira de constater le fait. Mais l’influence des travaux de l’école autrichienne, à cette heure, est grande en Angleterre, plus grande encore en Amérique; elle n’est pas nulle en France et en Italie4. Et il est permis de croire — d’espérer — que la conception autrichienne de l’économique comptera, dans l’avenir, des partisans de plus en plus nombreux.
- École des Hautes Études, Paris.
Note
- ↑ En allemand, Werth et Werthschätzung.
- ↑ Sur la théorie de l’intérêt, voir mon livre L’intérêt du capital, (Paris, Giard et Brière, 1904).
- ↑ J’ajouterai que la connaissance historique supplée dans une certaine mesure à la connaissance scientifique, lorsqu’on ne peut point parvenir à celle-ci. Les successions qui se sont produites dans le passé, et où l’on ne peut pas discerner sûrement des relations causales, permettant quelquefois d’émettre des prévisions avec quelque probabilité. On peut en outre, en prolongeant dans l’avenir les courbes dessinées par le faits dans le passé récent, se donner une idée de ce que sera cet avenir, ou du moins l’avenir le plus prochain.
- ↑ Je mentionnerai, pour l’Angleterre, les noms de Smart et de Hobson (celui-ci pour son Economics of distribution); Marshall aussi n’est pas sans avoir tiré profit des travaux des Autrichiens. Pour l’Amérique, je n’ai qu’à renvoyer à la collection du Quarterly journal of economics, où les théories autrichiennes ont fait l’objet d’une longue série d’articles; et il faudrait indiquer, encore, des ouvrages comme la Distribution of wealth de Carver. Pour la France, il me sera permis de mentionner mes propres ouvrages, et principalement mon livre sur L’intérêt du capital, déjà cité. Enfin, parmi les travaux italiens où l’influence autrichienne se fait sentir, il importe d’indiquer ceux de Pantaleoni (voir notamment les Principii di economia pura).