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le subconscient 79


travail mental pour écarter un souvenir qui causait de l’horreur et ce souvenir repoussé en quelque sorte de la conscience de la veille ne réapparaissait plus qu’en somnambulisme dans une autre synthèse mentale. On peut se demander si l’amnésie n’est pas déterminée par ce travail et si ce n’est pas aussi par un procédé de ce genre que certains malades passent de la phobie d’une fonction à la paralysie de cette même fonction. Ce serait le mécanisme de la répression volontaire dont beaucoup d’auteurs ont aujourd’hui exagéré l’importance. Je crois cependant que l’on ne peut pas tout expliquer par un mécanisme de ce genre. Beaucoup de sujets conservent indéfiniment des phobies d’une fonction sans arriver jamais à la paralysie et d’autres ont immédiatement la paralysie avec subconscience. Il faut toujours en revenir à mon avis à certaines différences fondamentales soit constitutionnelles, soit acquises dans l’état mental de ces individus. Chez les uns l’épuisement des fonctions cérébrales, qu’il soit déterminé par l’intoxication, par la fatigue ou par l’émotion, se manifeste seulement par une réduction générale, par une sorte de décapitation de ces fonctions qui semblent perdre leur partie supérieure et la plus récemment acquise; chez les autres l’épuisement cérébral amène rapidement un rétrécissement de la conscience avec la dissociation de la personnalité, la suggestivité et la subconscience qui en dépendent. Analyser ces deux dispositions fondamentales me paraît plus important pour comprendre le problème du subconscient que toutes les spéculations métaphysiques.

Il y aurait encore bien d’autres problèmes cliniques et psychologiques à propos de ces malades singuliers. Je ne puis signaler ici que les principaux; j’ai voulu surtout indiquer le point de vue qui me paraissait le plus utile. C’est surtout dans la clinique psychiatrique qu’est née la question du subconscient, elle n’est pas encore assez mûre pour en sortir. Ce problème est posé avant tout par l’interprétation de l’attitude de certains malades. Il faut constater ces attitudes sans les déclarer absurdes ou impossibles, il faut chercher à les comprendre en rapprochant divers malades les uns des autres de manière à saisir les intermédiaires qui expliquent l’évolution des phénomènes.

Paris, Collège de France.