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la diversité de fortune etc. 21


utilisable, énergie libre, motivité thermodynamique, ce qui représente en définitive l’utilité, la valeur, le prix que peut avoir pour nous un système matériel; et l’on n’attache d’importance à ce principe de la conservation de l’énergie, que parce que l’on croit à la conservation de la puissance motrice ou de l’énergie utilisable. En vain des physiciens éminents ont ils dénoncé cette confusion, comme M. Gouy l’a fait dans son mémoire sur l’énergie utilisable, comme M. le Chatelier l’a fait dans ses principes de l’énergétique. Le contresens a la vie dure: s’il est à ce point tenace, nous croyons en avoir trouvé la raison en étudiant ses origines historiques. Les premiers physiciens qui ont appliqué à la grandeur aujourd’hui définie par ce mot le terme d’énergie, ont cru faire usage d’un vocable vraiment neuf; en réalité ils ont pris un mot dont le sens était virtuellement déterminé et était tout autre; et, chose pire, il leur est arrivé d’employer le terme d’énergie dans le sens où le vulgaire l’emploie aujourd’hui, de capacité de produire du travail utile. C’est ce qui, selon nous, est a la fois l’explication et l’excuse du contresens si répandu qui fait confondre «l’énergie» tout court, l’énergie du physicien, celle qui se conserve, avec l’énergie utilisable ou libre, qui, elle, représente bien la valeur d’un système matériel, mais qui ne se conserve pas.

Dans le mémoire où il défend, devant la société philosophique de Glasgow, son expression d’énergie potentielle contre les critiques de Sir John Herschel, Macquorn Rankine déclare qu’au commencement du XIXe siècle, «le mot énergie a été substitué par le docteur Thomas Young à celui de vis viva pour désigner la capacité de produire du travail due à la vitesse acquise; et l’emploi du même mot, à une époque toute récente, a été étendu par sir William Thomson à une capacité, de quelque nature qu’elle soit, de produire du travail, — to capacity of any sort for performing work. — Il n’est pas douteux, ajoute Rankine, que le mot énergie ne soit tout spécialement adapté à cet objet; non seulement, sa signification est parfaitement d’accord avec l’étymologie: ἐνεργεια; mais le mot énergie n’a jamais été, dans des écrits scientifiques proprement dits, employé en différents sens, et ainsi tout danger d’ambiguité est évité. Il m’est apparu, par conséquent, que ce qui restait à faire, était de doter le substantif énergie d’adjectifs appropriés pour distinguer entre l’énergie