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la diversité de fortune etc. 13


lieu de condenseur, avec une simple chute de température, sans être en partie détruite.

Après avoir rappelé les principes de la conservation de la matière, «les raisons, dit Grove, qui portent à admettre la même doctrine de la non-création et du non-anéantissement en ce qui concerne les forces, sont puissantes au même degré». C’est toujours de conservation de forces ou de force, — au pluriel ou au singulier — qu’il est question dans ces écrits. On pouvait espérer que la substitution du mot énergie au mot force, qui a incontestablement apporté plus de correction à l’énoncé du principe, y apporterait aussi plus de clarté: ainsi que nous le verrons, c’est le contraire qui est arrivé.


Herbert Spencer, avec sa vaste curiosité de science, se montre moins ignorant que la plupart de ses contemporains en ce qui concerne la notion de déperdition d’énergie utile ou de dégradation d’énergie. Il cite, d’après une traduction anglaise, la conférence de Helmholtz «uber die Wechselwirkung der Naturkräfte». Mais on le sent imprégné, malgré tout et avant tout, de la pensée de conservation. C’est elle qui est l’élément dominant dans cet extraordinaire mélange de pensées originales et d’erreurs grossières qui constitue la théorie de «l’instabilité de l’homogène».

On sait comment Spencer a mis en circulation cette formule célèbre qui a participé à la fortune du positivisme anglais. Il pose en principe que l’homogénéité est toujours instable et que les phénomènes naturels tendent à la création d’hétérogénéités. Quand la diversification est poussée à l’extrême, il admet qu’il se produit, au contraire, un retour à l’homogène, et que la vie de l’univers matériel peut n’être qu’une série infinie d’oscillations entre le chaos et l’équilibre, entre un état de dissolution et un état de concentration. Ces développements ont pénétré l’imagination des physiciens et des philosophes: on en trouve le souvenir un peu partout, depuis les ouvrages de géologie, qu’imprègne souvent l’idée du «cycle géologique», jusqu’aux spéculations métaphysiques d’un Nietsche, que hante l’idée d’un «retour éternel» des choses. Nous avons dit ailleurs comment Spencer commet dès le début une confusion inadmissible: confondant stabilité avec immobilité, il cite comme exemple d’instabilité le fléau de balance oscillant autour de la position horizontale, sans s’aper-