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LA FONCTION DU SOMMEIL
I. - Le problème.
Pourquoi dormons-nous?
Dans les sciences biologiques, le mot «pourquoi» peut s’entendre de deux façons. Il peut signifier «par quel mécanisme», «comment», c’est le pourquoi causal; mais il veut dire aussi «dans quel but», «en vue de quelle utilité», c’est le pourquoi final.
On s’imagine fréquemment que l’emploi du mot pourquoi dans cette seconde acception n’est pas légitime, parce qu’il impliquerait l’existence de causes finales, de volontés prévoyantes cachées sous les phénomènes, ou autres agents mystérieux incompatibles avec une science fondée sur le déterminisme. En réalité, cette crainte est chimérique. Considérer les phénomènes biologiques sous l’angle de la finalité, ce n’est pas les exclure du déterminisme; c’est simplement les considérer d’une façon synthétique. Dans un organisme, les divers processus sont dans une relation réciproque; ils sont adaptés à une fin unique, la conservation de l’individu. Un organisme est un corps instable conservant invariable son milieu intérieur par des artifices divers. Il n’y a vie que tant que ce résultat est atteint. La vie implique donc l’adaptation de certains moyens à une certaine fin. Maintenant, cette finalité implique-t-elle des causes finales plus ou moins mystérieuses? En aucune façon. Elle n’est qu’un résultat de causes déterminantes qui, agissant pendant de longues générations, ont fini par faire prendre à la causalité le masque de la finalité. C’est le mérite immortel de Darwin d’avoir montré comment cette finalité a