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L'AVARE FASTUEUX | 355 |
justice a moi même. Mon père est le meilleur homme de la terre, mais il s’est laissé toujours conduire, et on l’a conduit très-mal.
Araminte. Mais, puisque vous connoissez cette verité, et vous devez la connoître1 mieux que personne, comment oseriez vous entraîner dans cet abîme2 de désordres et de dérangemens une fille qui a du bien, mais dont le bien coureroit le risque de se perdre dans un gouffre de dettes, et d’être dissipé par une mauvaise administration?
Le Vicomte. De grâce écoutez-moi, madame: j’ai servi comme vous savez, mais les moyens me manquent pour faire honneur a mon nom, et pour soutenir mon grade. J’ai imaginé qu’une dot honnête pourroit me mettre en état de continuer ma carrière. J’aurois pris une somme modique pour acquérir un emploi convenable, je vous aurois priée de garder le reste, et je me flattois que l’amour, le respect et la reconnoissance l’auroient merité votre attachement.
Araminte. Vos vues sont honnêtes, et je ne puis les condamner; je ne vous donnerai pas ma fille, mais votre situation me touche, et je suis prête à vous obliger.
Le Vicomte. Je suis pénetré de vos bontés, madame, mais.... vous me refusez votre fille.
Araminte. Ne vous en flattez pas, monsieur le Vicomte. Vous n’êtes pas dans le cas de vous marier; soyez libre, et laissez ma fille en liberté de suivre sa destinée. Si vous agréez les preuves de mon amitié, voici ce que je puis faire pour vous. Je vous offre la somme nécessaire pour acquérir un emploi militaire, un regiment même, si vous voulez. Je vous confierai l'argent sur votre billet, et sur votre parole d’honneur.
Le Vicomte. Et si je meurs, madame?
Araminte. Si vous mourez.... eh bien, je perdrai mon argent peut-être. Mais tout ne sera pas perdu. J’aurai obligé un honnête homme.