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174 | ACTE PREMIER |
Mde. Dalancour. Je viens de rencontrer ce bourru... Il grondoit, il grondoit!
M. Dalancour. Est-ce de mon oncle que vous parlez?
Mde. Dalancour. Oui. J’ai vu un rayon de soleil, j’ai été me promener dans le jardin, et je l’ai rencontré: il pestoit, il parloit tout seul, et tout haut; mais tout haut!... Dites-moi une chose... n’y a-t-il pas chez lui quelque domestique de marier?
M. Dalancour. Oui.
Mde. Dalancour. Assurément, il faut que cela soit: il disoit du mal du mari et de la femme; mais du mal!... Je vous en réponds.
M. Dalancour. (A part) (Je me doute bien de qui il parloit).
Mde. Dalancour. C'est un homme bien insupportable.
M. Dalancour. Cependant il faudroit avoir quelques égards pour lui.
Mde. Dalancour. Peut-il se plaindre de moi? Lui ai-je manqué en rien? Je respecte son âge, sa qualité d’oncle. Si je me moque de lui quelquefois, c'est entre vous et moi; vous me le pardonnez bien? Au reste, j’ai tous les égards possibles pour lui; mais dites-moi sincèrement, en a-t-il pour vous? en a-t-il pour moi? Il nous traite très-durement, il nous hait souverainement; moi, surtout, il me méprise on ne peut pas davantage. Faut-il, malgré tout cela, le flatter, aller lui faire notre cour?
M. Dalancour. (Avec un air embarrassé) Mais... quand nous lui ferions notre cour... il est notre oncle; d’ailleurs, nous pourrions en avoir besoin.
Mde. Dalancour. Besoin de lui! Nous? Comment? N’avons-nous pas assez de bien pour vivre honnêtement? Vous êtes rangé. Je suis raisonnable. Je ne vous demande rien de plus que ce que vous avez fait pour moi jusqu’a présent. Continuons avec la même modération, et nous n’aurons besoin de personne.
M. Dalancour. (D’un air passionné) Continuons avec la même modération!...
Mde. Dalancour. Mais oui; je n’ai point de vanité, je ne vous demande pas davantage.