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LE BOURRU BIENFAISANT | 167 |
M. Géronte. (Vivement) Oui, ou non?
Angélique. Mais, oui.
M. Géronte. (Encore plus vìvement) Oui? Vous voulez vous marier, perdre la liberté, la tranquillité? Eh bien! tant pis pour vous; oui, je vous marierai.
Angélique. (A part) (Qu’il est charmant, avec sa colère!)
M. Géronte. (Brusquement) Avez-vous quelque inclination?
Angélique. (a part) (Si j’osois lui parler de Valère!)
M. Géronte. (Vìvement) Quoi! auriez-vous quelque amant?
Angélique. (A part) (Ce n’ est pas le moment; je lui ferai parler par sa gouvernante).
M. Géronte. (Toujours avec vivacité) Allons; finissons. La maison où vous êtes, les personnes avec lesquelles vous vivez, vous auroient-elles fourni l'occasion de vous attacher à quelqu’un? Je veux savoir la vérité; oui, je vous ferai du bien: mais à condition que vous le méritiez; entendez-vous?
Angélique. (En tremhlant) Oui, monsieur.
M. Géronte. (Avec le mème ton) Parlez-moi nettement, franchement: avez-vous quelque inclination?
Angélique. (En hésitant et tremblant) Mais... non, monsieur, je n’en ai aucune.
M. Géronte. Tant mieux. Je penserai à vous trouver un mari.
Angélique. (A part) (Dieu! je ne voudrois pas...) (à monsieur Gèronte) Monsieur...
M. Géronte. Quoi?
Angélique. Vous connoissez ma timidité...
M. Géronte. Oui, oui, votre timidité... Je connois les femmes: vous êtes à présent une colombe; quand vous serez mariée, vous deviendrez un dragon.
Angélique. Hélas! mon oncle, puisque vous êtes si bon...
M. Géronte. Pas trop.
Angélique. Permettez-moi de vous dire...
M. Géronte. S'en s’approchant de la table) Mais Dorval ne vient pas.
Angélique. Ecoutez-moi, mon cher oncle...
M. Géronte. (Occupé à son échiquier) Laissez-moi.