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M. Goldoni a répété tout cela plusieurs fois pour obtenir son pardon: mais on ne l’en a pas jugé digne. Je me trouvai à la réprésentation del Cavaliere e la Dama, qui est une de ses meilleures Pièces. Vous en connaissez le prix, nous en connaissons tous la vérité; & ce fut justement la vérité de l’action & des caractères qui souleva contre l’Auteur ses premiers ennemis dans nôtre ville. On lui reprocha de s’être faufilé trop librement dans le sanctuaire de la Galanterie, & d’en avoir dévoilé les mystères aux yeux profanes de la populace. Le Chévaliers errants se piquerent de défendre leurs Belles: celles-ci les exciterent à la vengeance par certaine rougeur de commande, fille apparente de la modestie, mais qui l’est réellement de la rage & du dépit.
Enfin, Monsieur, on pourra jouer sur la Scene l’amour d’un Roi, dans Pyrrhus, qui manque à sa parole; l’impiété d’une Reine, dans Sémiramis, qui se porte à verser le sang de son époux pour regner à sa place; les amoureux transports d’une Princesse, dans Chimène pour le meurtrier de son Pere; & tant d’autres Monarques empoisonneurs, traîtres, tyrans sans qu’ il soit permis d’y exposer nos faiblesses.
Voilà le procès que l’on fait à Goldoni: imaginez-vous quels en peuvent être les accusateurs. Il a fait le sourd, il a continué son train, & par-là il a obtenu la réputation d’Auteur admirable, & de Peintre de la nature; titres que vous-même lui avez confirmés. Mais revenons &c.