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son Ircana, sa Pamela et ses autres pétarades dans le goút vénitien. Dans ce Germondo c’est un roi qui est mort et qui n’est pas mort: c’est le prince son fils, qui part fort en colere pour aller venger la mort de ce roi vivant, sans savoir auparavant s’il y a des raisons pour se mettre en colere: c’est un monarque furieusement jaloux sans avoir la moindre raison raisonnable de l’étre, et qui veut faire mourir son fils qu’il aime, uniquement parce qu’il l’a trouvé l’épée á la main, prét á se battre avec un coquin: c’est une reine mariée et non mariée en méme temps, mediante et non mediante au méme instant, qui s’empoisonne pour le pur plaisir de s’empoisonner: ce sont des grandes rages et des violences sans aucun motif visible: ce sont des tourments fort cuisants, dont personne n’a jamais été tourmente: c’est enfin une bétise qui passe toutes les bétises, bétement parsemée d’exclamations, d’interjections et de petites phrases très bétement volées aux oeuvres de Metastasio.

Comment, m’écriai-je, en lisant ce salmigondis, est-il possible que cela ait été fait par l’auteur du Bourru bienfaisantí Se peut-il qu’un étre de raison dans une langue qui lui est étrangère, ne soit qu’un benét dans sa langue naturelle?

Cependant les choses impossibles ne sauraient jamais étre que des choses impossibles. Nul homme n’eut jamais deux ámes en partage, l’une raisonnable et l’autre non. N’y aurait-il pas ládessous de la tricherie? N’en aurait-on pas impose au public en donnant Le bourru bienfaisant á cet homme-lá?

Je conviens que je ne saurais donner la moindre preuve legale de ce que je m’en vais dire; mais je dis, malgré cela, que l’auteur du Germoíido n’est point l’auteur du Bourru bienfaisant. Non: c’est lá une chose impossible, qui ne saurait jamais étre une chose possible. L’est-elle? peut-on me le prouver? Je signe dès á présent que je suis un sot moi-méme: un sot, un maitre sot, qui ne connaít plus rien á la nature humaine, n’ayant jamais pu comprendre qu’un homme pút étre blanc et noir tout á la fois.

En attendant que Goldoni soit l’auteur du Bourru bienfaisant ou ne le soit pas, j’exhorte monsieur de Voltaire á se