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actuellement sur la scène n’aient point á changer de place, ce qui serait contre une des unités d’Aristote. On ne saurait pourtant nier qu’il ne soit un peu absurde de recourir á une magie arbitraíre, qui change tout á coup un bátiment en un autre, sans que ceux qui sont dedans, ou bien les spectateurs, aient la moindre raison de s’attendre á ce changement.
Dans ce tempie ainsi báti á l’impreviste, voilá Sémiramis entourée des seigneurs et dames de sa cour, du clergé, du peuple et de ses gardes. Le beau coup d’oeil! Il n’y a pas d’endroit au monde plus á propos pour y faire paraítre un revenant!
Sémiramis vient, nouvelle Jocaste, épouser son fils Ninias, qu’elle croit n’étre que le fils d’un sarmate, c’est-á-dire, d’un polonais ou d’un lithuanien. Ce Ninias est un grand gargon d’entre seize et dix-sept ans, qui, malgré son manque de barbe, a tant gagné de batailles rangées, qu’il a mérité depuis je ne sais combien de temps, 1’ honneur d’étre maréchal general des armées de Babylone, tout comme monsieur de Turenne dans un áge plus avance le fut jadis des armées fran^aises.
C’est dans ce tempie, devant cette reine, devant ce fils, devant tout ce grand monde, que le revenant doit faire son apparition. Un tombeau qui est dans un coin du tempie s’entr’ouvre, et l’ombre de Ninus en sort. Il faut pourtant savoir d’avance que cette apparition n’est pas tout-á-fait inconnue á la reine. Il y a trois mois que l’envie a pris á Ninus de se venger de sa perfide moitié, et qu’il a commencé de se montrer á elle en revenant pendant la nuit, un glaive á la main, après avoir reste pendant quatorze ans et neuf mois fort tranquille dans son superbe mausolée. Mais le jour est venu que sa vengeance doit ètre consommée. Il sort donc du tombeau en ombre royale: c’est-á-dire, habillé en roi, couvert d’un crèpe noir et transparent, á travers duquel on peut apercevoir ses superbes habits et la belle couronne qu’il a sur la tèté. La voilá cette ombre, qui s’avance d’un air fier, et va s’asseoir sur une estrade au milieu de la belle assemblée.
Pendant qu’elle approche, son fils Ninias, qui apparemment ne se connaít guère aux ombres, la croit un dieu, et lui dit