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méme aux plus heureux génies, d’en maítriser une aussi difficile que l’anglaise en si peu de temps, et de la maítriser au point de l’écrire aussi finement, aussi couramment, qu’elle est écrite dans les deux traités. Quiconque est assez innocent pour ajouter foi á de pareils prodiges, n’a que faire de refusar sa croyance aux plus gros miracles de saint Antoine de Padoue. L’on peut apprendre beaucoup d’une langue dans un an, quand on s’y sacrifie tout entier; mais il en faut un peu plus d’un et de deux pour bien écrire des jolis traités en anglais. Un étranger ne s’en tire pas si britanniquement, s’il n’a lu auparavant beaucoup plus de livres qu’on n’en saurait lire durant les deux premières années qu’il emploit á l’étudier. Monsieur de Voltaire a beau dire dans ses Mélanges qu’«il ne faut qu’un an pour apprendre une langue», et que Pie de la Mirandole «en savait vingt-deux á l’áge de vingt ans»: cela n’avancera pas sa cause. Pie de la Mirandole était prince, et prince absolu: ces princes-lá font tout ce qui veulent quand tei est leur plaisir. Mais monsieur de Voltaire n’est pas prince de la Mirandole.
Donnons néanmoins ceci pour rien, et ne jugeons point de son polyglottisme par le nòtre; faisons seulement attention qu’il n’a jamais écrit une page d’anglais durant les cinquante années qui se sont écoulées depuis l’apparition des deux traités. S’il avait une bonne fois été capable d’écrire dans cette langue avec aisance, est-il croyable qu’aussitót sorti d’Angleterre il auraittout á coup fait banqueroute á l’ anglais et n’aurait plus voulu en écrire une seule page, lui qui a la rage de se donner pour très savant dans tant de langues et dans l’anglaise par dessus toutes? lui qui a tant de fois jugé en dernier ressort de l’hébreu, du grec, du latin, de l’italien, de l’espagnol, du portuguais, de l’allemand et presque du chinois? Pas seulement une page d’anglais, lui qui a écrit des centaines de lettres á plusieurs mylords ses correspondants? Il est certain, s’il eút été l’auteur des deux traités, qu’il aurait pu en écrire des milliers á piume courante; et l’on peut presumer, sans lui faire grand tort, que sa vanite, ou l’intérét de sa gioire, lui aurait fait chercher les occasions d’en écrire le plus qu’il lui aurait été possible. Loin