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Le gran poète de l’avenir | 255 |
des bibliothèques, il maniera ce matériel avec aisance, sachant demeurer à la portée de tout le monde sans s’interdire de placer de temps en temps un vieux mot savamment déterré. Les classiques lui seront familliers. Le seul poète véritablement grand qui les ait peu connus est Shakespeare. J’ose dire qu’on s’en aperçoit à l’absence, dans son œuvre, de ce que le Dante appela «lo fren dell’arte», la mesure. La poésie dont les racines atteignent secrètement ces couches profondes et riches a plus de chance de grandir dans le soleil. Les poètes faibles qui se sont nourris du grec et du latin n’ont pu les digérer et en ont pris des rides précoces, un air désagréable de pédanterie, le pas lourd et lent de la vieillesse; les robustes au contraire, tout en ne perdant rien de leur originalité, en ont gagné en force, en solidité, en grâce, et en ont pris un air de grands seigneurs que les écrivains dépourvus d’études classiques n’auront jamais.
C-est qu’il y a dans les œuvres des classiques un élément impérissable de beauté, une âme immortelle qu’il est difficile de saisir, car elle se cache derrière les mots, elle est dans la pensée qui a déterminé leur choix et leur disposition en vue de l’effet à produire sur les contemporains du poète. Ceux qui étudient les classiques sans le