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ait jamais accouplé dans sa pensée le rôle du poète à une théorie évolutionniste quelconque. Il s’est contenté de dire:

la poésie est l’étoile
Qui mène à Dieu rois et pasteurs,

Il a touché au but d’un coup d’aile; quant à nous, il nous faut prendre un chemin plus long.

D’abord, le grand poète du xxe siècle aura une connaissance exacte et sûre du terrain de la poèsie. Il ne lui arrivera pas ce qui arrive maintenant à des confrères qui, ne se souciant guère de s’éclairer là dessus ni de consulter les étoiles, s’égarent, malgré leur incontestable talent, sur les frontières de la poèsie, entrent par mégarde dans le territoire de la peinture ou de la musique, en rapportent des assemblages incohérents de mots curieusement coloriés ou curieusement sonores, d’où il est impossible de tirer un sens quelconque, ce qui les fait admirer par des sots vaniteux qui se croient intelligents et par des intelligents modestes qui se croient sots. Il s’écartera de l’école qui prétend monopoliser le culte de la Beauté dont elle n’a qu’une perception incomplète. Il l’égalera par le sens exquis de la Beauté sensible, mais il la surpassera par le sens de la Beauté intellectuelle et morale. Il entendra la voix de l’Esprit de Beauté