morale et d’une vague appréhension du surnaturel et de l’esprit que le spectacle de la mort lui inspirait. Les livres sacrés de l’Orient et de l’Egypte avec leur poésie d’une solennelle grandeur, les hymnes homériques, les gnomiques de tous pays sont là pour nous témoigner que les poètes ont été les premiers maîtres de la religion et de la morale, c’est-à-dire de toute civilisation. La division des fonctions sociales ne leur permit pas de garder longtemps une si haute dignité. De maîtres qu’ils étaient ils eurent l’air de devenir esclaves, ils furent les historiographes des grands et les charmeurs du peuple. Ceci les amoindrissait personnellement, mais c’était encore à l’élément supérieur de l’âme humaine qu’ils s’adressaient, c’était la vie supérieure qu’ils surexcitaient chez leurs contemporains par des chants où la puissance protectrice et vengeresse des dieux, les exploits des héros, l’amour de la patrie figuraient de manière à développer les sentiments et les qualités morales plus nécessaires à bien garder une civilisation naissante entourée de barbares. Les rhapsodes étaient donc encore des éducateurs, quoique leur poésie visât à charmer et à amuser, ce qui n’a probablement jamais été l’ambition des nobles poètes des Veda, du Livre des Morts et des hymnes hómériques. Le don naturel de charmer,